Page 5 - Demo
P. 5
5 - T%u00c9L%u00c9VIE.NEWS 13 - D%u00c9CEMBRE 2024l%u2019expression g%u00e9nique et constat%u00e9 des diff%u00e9rences. Et en associant ces donn%u00e9es aux images obtenues par biopsie, nous allons entra%u00eener une IA %u00e0 d%u00e9tecter si ces modifications mol%u00e9culaires se traduisent par des diff%u00e9rences visuelles, dans l%u2019interaction entre les cellules canc%u00e9reuses et le syst%u00e8me immunitaire, par exemple. %u00bbCette combinaison de donn%u00e9es, Christos Sotiriou en est persuad%u00e9, repr%u00e9sente l%u2019avenir de la recherche comme de la clinique en oncologie : %u00ab Il y a tout d%u2019abord toutes les donn%u00e9es que l%u2019on appelle multiomiques, qui repr%u00e9sentent non seulement l%u2019expression des g%u00e8nes, mais aussi les prot%u00e9ines, le m%u00e9tabolisme, etc. Et l%u2019analyse de ces donn%u00e9es via l%u2019IA va nous permettre d%u2019avoir une meilleure compr%u00e9hension de tout le paysage de la tumeur, de la fa%u00e7on dont les g%u00e8nes se traduisent en prot%u00e9ines et dont ces derni%u00e8res vont participer au m%u00e9tabolisme des cellules canc%u00e9reuses. %u00bb%u00ab Et puis il y a toutes les autres donn%u00e9es que nous allons pouvoir combiner, comme les radios, poursuit le chercheur. Nous allons d%u00e9buter une %u00e9tude ici %u00e0 l%u2019Institut Bordet, pour combiner toutes les donn%u00e9es g%u00e9n%u00e9tiques et anatomo-pathologiques avec des IRM mammaires, les traiter avec l%u2019IA, afin de pr%u00e9dire la r%u00e9ponse des patientes %u00e0 un traitement pr%u00e9op%u00e9ratoire de leur cancer du sein. Et l%u2019id%u00e9al serait de combiner ces donn%u00e9es %u00e0 des donn%u00e9es biologiques, issues de prises de sang, car je pense qu%u2019il y a l%u00e0 des dynamiques dont on ne tient pas compte parce qu%u2019on ne les voit pas. Nous avons par exemple une lecture tr%u00e8s simple des taux de globules blancs, or ceux-ci varient sans doute d%u2019une fa%u00e7on ind%u00e9tectable pour nous, mais qu%u2019une IA serait capable de les identifier comme sp%u00e9cifiques de l'%u00e9volution de tel ou tel cancer. %u00bbGuider la radioth%u00e9rapie Tous les praticiens et praticiennes font r%u00e9guli%u00e8rement appel %u00e0 des techniques d%u2019imagerie m%u00e9dicale, et c%u2019est encore plus vrai pour la radioth%u00e9rapie. %u00ab %u00c0 la base du travail des radioth%u00e9rapeutes, nous partons des images obtenues par CT-scan, IRM ou PET-scan afin de d%u00e9finir les volumes consid%u00e9r%u00e9s comme tumoraux, et donc %u00e0 irradier, tout en les distinguant des tissus sains qui doivent %u00eatre prot%u00e9g%u00e9s %u00bb, r%u00e9sume Philippe Coucke, Professeur %u00e9m%u00e9rite de radioth%u00e9rapie au CHU de Li%u00e8ge. Et pour le m%u00e9decin, l%u2019aide de l%u2019IA dans ce domaine devient obligatoire %u00e0 l%u2019heure o%u00f9 le nombre d%u2019images augmente sans cesse, et que le nombre de praticiens se r%u00e9duit. %u00ab Il n%u2019est pas rare qu%u2019un radioth%u00e9rapeute doive d%u00e9terminer une vingtaine de structures %u00e0 irradier ou %u00e9pargner, avec une pr%u00e9cision millim%u00e9trique, voire en dessous du millim%u00e8tre, indique Philippe Coucke. Plusieurs recherches ont montr%u00e9, dans le cas de tumeurs ORL, que l%u2019utilisation de l%u2019IA r%u00e9duit par un facteur 10, 20, voire 80, le temps requis pour d%u00e9terminer les volumes de tissus sains %u00e0 prot%u00e9ger. %u00bb D%u2019autant que, depuis les d%u00e9buts de la radioth%u00e9rapie, la technique a grandement %u00e9volu%u00e9. Le nombre de faisceaux de radiations ionisantes a augment%u00e9, afin de diminuer la dose de chaque rayon. %u00ab Cette %u00e9volution a pour cons%u00e9quence de devoir optimiser le nombre de faisceaux, leur puissance, leur angle%u2026, d%u00e9taille le m%u00e9decin. Et pour un outil comme le CyberKnife disponible au CHU de Li%u00e8ge, c%u2019est plusieurs centaines de faisceaux qui entrent en action ! On ne peut imaginer une seule seconde que l%u2019esprit humain puisse calculer la bonne configuration sans l%u2019assistance d%u2019une machine. %u00bbCette capacit%u00e9 de l%u2019IA %u00e0 lire des images et analyser des donn%u00e9es m%u00e9dicales de fa%u00e7on de plus en plus pertinente va %u00e9galement permettre, selon Philippe Coucke, d'optimiser la dose de radiation re%u00e7ue par les patients. %u00ab Quelques %u00e9tudes ont montr%u00e9 qu'il est possible de combiner les images m%u00e9dicales avec d'autres donn%u00e9es m%u00e9dicales, comme les donn%u00e9es g%u00e9n%u00e9tiques, afin de d%u00e9terminer plus pr%u00e9cis%u00e9ment si un patient r%u00e9pondra ou non au traitement, expliquet-il. On peut m%u00eame aller plus loin et s'int%u00e9resser aux donn%u00e9es issues de la flore intestinale, c'est le microbiote. Le microbiome est diff%u00e9rent. Il existe de superbes %u00e9tudes qui lient l%u2019importance du microbiome %u00e0 la r%u00e9ponse du patient en radioth%u00e9rapie, ce qui pourrait nous amener %u00e0 adapter le traitement en fonction du moment de la journ%u00e9e, pour par exemple r%u00e9duire la toxicit%u00e9 intestinale quand on est amen%u00e9 %u00e0 irradier l%u2019abdomen. %u00bbEt en d%u00e9pit de ces ind%u00e9niables succ%u00e8s, le radioth%u00e9rapeute a bien conscience du changement majeur qu%u2019apporte l%u2019IA dans le domaine m%u00e9dical : %u00ab Je comprends parfaitement les peurs li%u00e9es %u00e0 l%u2019arriv%u00e9e de ces machines dans nos pratiques m%u00e9dicales. Cependant, je pense que nous ne devons pas nous priver de ce GPS qu%u2019est l%u2019IA, et %u00eatre pragmatiques. Il est ind%u00e9niable que nos syst%u00e8mes de soins sont %u00e0 bout de souffle, et que nous faisons face %u00e0 une p%u00e9nurie de soignants. Il est donc n%u00e9cessaire de d%u00e9l%u00e9guer une partie de nos t%u00e2ches %u00e0 un syst%u00e8me automatis%u00e9, et retrouver ainsi plus de temps pour l%u2019essentiel de l%u2019art de gu%u00e9rir : l%u2019empathie, l%u2019%u00e9coute et l%u2019accompagnement. %u00bbD%u2019autant que le m%u00e9decin plaide %u00e9galement pour un changement de paradigme. %u00ab Si l'IA nous permet d'obtenir de tr%u00e8s bons r%u00e9sultats en termes de traitement, il ne faut pas n%u00e9gliger tout ce qu'elle peut apporter %u00e9galement %u00e0 l'aspect pr%u00e9ventif de la sant%u00e9, en pr%u00e9venant les r%u00e9cidives ou en adaptant la surveillance de fa%u00e7on personnalis%u00e9e,estime-t-il. Il y a, dans ce domaine, d'immenses progr%u00e8s %u00e0 faire. %u00bbThibault Grandjean