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DoSSiER « A l’exclusion des incapables d’en haut, doit correspondre l’utilisation de toutes les forces intellectuelles d’en bas ». Citation d’Émile Francqui, qui souhaitait ouvrir les portes des universités à toutes les couches de la population, et non plus aux seuls nantis. recherche selon laquelle la recherche fondamentale est la source de toutes les inventions utiles socialement et écono- miquement. Cette conception traverse le Fonds et les universités. » donateurs, constituent près de 70% du tout le Discours de Seraing d’octobre total. Parmi les principaux donateurs, on 1927. De plus, pour parer au scepticisme Robert Halleux insiste par ailleurs sur une compte la famille Solvay, la Société Gé- de certains industriels, une Commission autre spécifcité importante qui constitue nérale ou encore la Banque d’outre-mer mixte Science-Industrie est d’emblée ins- le fondement même du FNRS, à savoir qui employait Émile Francqui. tallée. Avec son profl résolument tourné une confance envers ses chercheurs, qui vers la recherche appliquée, cette Com- bénéfcient d’une liberté totale tant pour C’est donc dès les années 30 déjà mission est un peu l’ancêtre de l’IRSIA, ce qui concerne leurs sujets que leurs qu’« une loi de fnancement a assuré devenu le FRIA. » méthodes de recherche. au Fonds une contribution annuelle de l’État. Le FNRS perd une grande part de Mais selon Robert Halleux, cette re- Une initiative de mécènes son autonomie par rapport à l’État », ex- cherche fondamentale rencontrait tout plique Robert Halleux. D’autant que dès de même les idéaux de certains de Le FNRS est né de la motivation de mé- 1948, un haut fonctionnaire du ministère ces industriels : « Même s’ils n’étaient cènes, qui ont soutenu le Fonds de son de l’instruction publique était installé pas convaincus de l’utilité de certaines existence, jusqu’à la Seconde Guerre au sein du Conseil d’Administration du recherches, notamment en sciences mondiale, comme le souligne Robert Fonds… humaines, ils la fnançaient, parce que Halleux : « Pourquoi du mécénat privé ? Ernest Solvay er l’elle avait un impact sur la renommée L’idée du Roi Albert 1 et de son entou- Et aujourd’hui, a fortiori, il faut admettre du pays. C’est par exemple le cas des rage, fortement infuencé par les idées que le modèle économique du FNRS est fouilles d’Apamée… Les vieux Albertiens américaines, était que la science ne doit bien loin de son schéma initial : « Pour ont la même idéologie, qui allie ferté na- pas être fnancée par l’État. Cette idée ce qui concerne le fnancement privé, tionale, science, réussite par le mérite (ils a prévalu jusqu’à la fn de la Seconde il y a bien des initiatives de généraux attribuent à la science un rôle d’ascen- guerre mondiale, à un moment où ce donateurs pour la science en général. seur social) et volonté d’encourager des mécénat privé s’est essouffé et n’a plus Aujourd’hui, les gros mécènes, du fait de individus d’élite, par le mécénat privé, suff, nécessitant de recourir dès lors à la crise économique, ont laissé la place comme cela se faisait déjà Outre-Atlan- l’aide de l’Etat. » Kenneth Bertrams pré- aux petits. Autre évolution : « Dans beau- tique. » cise que 11.7% des donateurs, institu- coup de cas, les fnancements visent des tionnels compris, ont fait don de 92.2% domaines précis qui sont commandités inspiration tirée du privé du montant total ; les dons supérieurs ou par les industries, ce qui enlève la liberté C’est le modèle américain qui semble le égaux à un million de francs, issus de 29 de recherche, s’inscrivant dans une lo- gique capitaliste. » plus avoir infuencé les mécanismes du FNRS à sa création : « Les mécanismes du FNRS sont relativement originaux : dy- namique privée, rôle des universités, par- ticipation des industriels en amont et en aval. S’il fallait retenir un seul précédent au profl analogue, il s’agirait du ‘National Research Fund’ américain créé en 1925, mais dont l’existence fut brève. Le fait que l’initiateur de ce programme n’est autre que Herbert Hoover, complice de Franc- qui pour assurer la campagne humani- taire en Belgique durant la guerre, est ré- vélateur de la synergie belgo-américaine en matière de recherche scientifque », poursuit Kenneth Bertrams. Le rôle des universités est par ailleurs unique. « Les universités occupent une place centrale dans le nouveau dispositif. Il n’existe pas de laboratoire de recherche propre au FNRS. Ceci distingue le Fonds des autres ‘caisses de recherche’ créées à la même période (allemande, française, néerlan- daise et américaine). En outre, les rec- teurs sont membres ex offcio du conseil d’administration du FNRS et les profes- seurs sont invités à remplir les commis- sions d’évaluation scientifque. Ainsi, on évite tout sentiment de compétition entre
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