Christine Bastin, Maître de recherches FNRS au GIGA CRC In vivo Imaging - Aging & Memory de l'ULiège, recevait hier une bourse de 300.000 € de Stop Alzheimer (Fondation pour la recherche sur Alzheimer) pour aider à détecter plus tôt les premiers signes de la maladie d'Alzheimer afin de bénéficier de l’efficacité des traitements actuels.
En Belgique, une personne sur cinq, et jusqu’à une femme sur trois développera une forme de démence. Parmi les différentes manifestations de la démence, sept sur dix concernent la maladie d’Alzheimer. Or, les rares traitements existants ne sont efficaces que si la maladie est diagnostiquée de manière précoce.
Analyse de deux réseaux de mémoire
Habituellement, pour comprendre pourquoi les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ont des problèmes de mémoire, on cherche à relier un problème de mémoire spécifique à un endroit précis dans le cerveau. Mais aujourd'hui, on sait que notre mémoire fonctionne davantage comme un réseau de connexions entre différentes parties du cerveau, plutôt que via des zones isolées.
Des recherches précédentes ont permis d’identifier deux réseaux dans une partie du cerveau liée à la mémoire : l'un de ces réseaux semble être spécialisé pour se souvenir des détails précis des événements vécus (par exemple, se souvenir d'avoir acheté des bouteilles d'Evian), tandis que l'autre est plus impliqué dans le souvenir des informations plus générales (par exemple, se souvenir d'avoir acheté de l'eau).
Le projet de recherche de Christine Bastin vise à tester ces deux types de mémoire et à vérifier comment fonctionnent ces deux réseaux dans le cerveau lors du vieillissement normal et lorsqu'il y a la maladie d'Alzheimer. L'objectif est de développer des tests spécifiques pour évaluer ces différents types de mémoire, ce qui pourrait aider à détecter plus tôt les premiers signes de la maladie d'Alzheimer afin de bénéficier de l’efficacité des traitements actuels.
« La forme la plus typique de la maladie d’Alzheimer débute par des difficultés de mémoire, explique la chercheuse. Un défi pour les neuropsychologues est d’arriver à distinguer les problèmes de mémoire qui caractérisent les premiers stades d’une maladie d’Alzheimer des troubles de mémoire dus au vieillissement normal. C’est l’objectif que nous poursuivons avec ce projet. Pour cela, nous nous basons sur les connaissances les plus récentes sur le fonctionnement de la mémoire et sur son organisation dans le cerveau. Les régions cérébrales clés de la mémoire sont impliquées dans deux réseaux. Un réseau permet de nous souvenir des événements avec précision et détails, tandis que l’autre est impliqué dans le souvenir du sens ou de la forme générale d’un événement. L’hypothèse que nous allons tester est que, dans le vieillissement normal, la mémoire des détails se perd mais est compensée par une très bonne mémoire de la forme générale. A l’inverse, dans la maladie d’Alzheimer, les deux formes de mémoire sont touchées, et le réseau de mémoire générale serait particulièrement perturbé. Pour évaluer cela, nous allons créer des tâches de mémoire originales et combiner l’analyse des profils mnésiques à des mesures du fonctionnement des réseaux cérébraux avec l’imagerie par résonance magnétique auprès de personnes âgées sans trouble cognitif et de personnes souffrant d’une maladie d’Alzheimer débutante. Le projet devrait donc permettre d’affiner les tests neuropsychologiques qui permettent de détecter les premières pertes de mémoire annonçant une maladie d’Alzheimer. »